Moncef ABDELAZIZ
Consultant - Conseil Stratégique
Les commerçants ou importateurs dits du "cabas", connus sur le nom de « trabendistes » sont ces jeunes entrepreneurs débrouillards qui introduisent sur le territoire national des marchandises achetées à l’étranger, en quantités limitées et destinées, selon la réglementation actuelle, à un usage personnel.
Ce canal d'importation, longtemps toléré, s’inscrivait dans une zone grise de l’économie, proche de l’informel ou trabendo : téléphones portables, produits cosmétiques, chocolats et fromages en tout genre inondent les magasins des grandes villes algériennes. Ces produits répondent néanmoins à un besoin, a une demande.
Cette récente initiative annoncée par le président de la république visant à régulariser cette activité est une décision judicieuse, en phase avec la volonté de formaliser l’économie et de mieux réguler les marchés.
Pourquoi est-ce une bonne nouvelle ?
Pour l’État : cette régularisation permettra de capter des recettes fiscales jusque-là échappant au circuit officiel. Elle offre aussi un meilleur contrôle sur les flux de marchandises, favorisant la traçabilité, la conformité des produits et la lutte contre la contrefaçon ou les produits dangereux. C’est un manque à gagner-important qui échappait à la fiscalité, de trabendiste informel, ces commerçants passeront au statut d’entrepreneurs en toute légalité.
Pour le marché : une offre mieux régulée permet de limiter les distorsions de concurrence et de garantir un équilibre entre l'importation et la production locale, notamment dans un contexte où cette dernière se développe de façon organique et mérite d’être protégée et encouragée. ll ne faut pas oublier que, dans certains secteurs, la demande dépasse largement l’offre disponible. Dans ce contexte, la présence de marques importées constitue une solution pertinente pour pallier le manque d’alternatives locales et répondre aux besoins des consommateurs.
Pour les jeunes commerçants : cette initiative représente une opportunité de sortir de l’informel et d’intégrer l’économie légale, avec tout ce que cela implique en termes de droits, de protection sociale, d’accès au financement et de perspectives de croissance. Elle leur permettra surtout de professionnaliser leur approche commerciale, d’ouvrir un compte bancaire, de structurer leur activité et, pourquoi pas, de réfléchir à moyen et long terme à leur propre contribution à l’économie nationale — que ce soit à travers la création d’emplois, le paiement d’impôts, ou même le développement de leurs propres marques. C’est une véritable transition vers l’entrepreneuriat formel et responsable.
Pour les consommateurs : ces produits "cabas" répondent à une demande réelle et croissante. De nombreux Algériens recherchent ces produits importés, souvent absents de l’offre locale, même s’ils sont plus chers. En régularisant cette activité, l’État ne limite pas le choix des citoyens — il l’élargit. Les consommateurs pourront ainsi arbitrer librement entre produits locaux de qualité et produits d’importation, un bel équilibre de l’offre et de la demande. Cet élément encourage ainsi nos marques locales à travailler sur la partie qualitative de leurs produits, s’inspirant des marques internationales, mettant le focus sur la recherche et développement. Le label made in Algeria n’a absolument rien à envier aux produits venus de l’autre côté de la méditerranée.
La régularisation du "cabas" n’est donc pas une contrainte, mais une opportunité : celle d'intégrer des acteurs économiques existants dans un cadre légal, de dynamiser l’économie, de préserver les emplois, et surtout, de respecter le choix du consommateur.
Une réforme prometteuse qu’il faudra accompagner de procédures simples, d’un encadrement clair, et d’une communication pédagogique auprès des principaux concernés.
La régularisation du "cabas" n’est donc pas une régression ou une répression, mais une intégration. Elle vise à transformer une réalité économique existante en levier de développement, à préserver les emplois et à mieux organiser les échanges commerciaux.