Moncef ABDELAZIZ
Consultant - Conseil stratégique
Il est des victoires qui dérangent. Il est des femmes dont la force trouble les esprits étriqués. Imane Khelif, boxeuse algérienne, championne du monde 2024 dans sa catégorie, est aujourd’hui la cible d’une campagne internationale de haine et de désinformation d’une rare violence.
Ces attaques ne visent pas seulement la sportive. Elles s’en prennent à son honneur, à son corps, à son identité de femme, et par extension, à tout un peuple qui l’a portée, soutenue, aimée, et fièrement célébré
Une pluie de mépris et d’attaques abjectes
Depuis sa victoire éclatante aux jeux olympiques de Paris, les réseaux sociaux et certains médias étrangers relaient des rumeurs ignobles : “Elle serait un homme”, “son genre est suspect”, “elle n’est pas une vraie femme”, allant jusqu’à publier des photomontages, des vidéos déformées, des comparaisons honteuses. Des influenceurs, journalistes ou internautes, souvent d’obédiences connues pour leur hostilité envers l’Algérie, relaient ces propos sans vérification, amplifiant la haine.
Parmi les accusations :
• Son apparence “trop musclée” serait un “indice”.
• Son timbre de voix jugé “grave” serait une “preuve”.
• Certains vont jusqu’à réclamer son test ADN ou des vérifications gynécologiques.
Des accusations infondées, sexistes, racistes. Car dans l’histoire du sport, jamais aucune autre boxeuse ou athlète n’a été aussi violemment attaquée pour son apparence physique alors même que d'autres sportives dans le monde – plus massives ou plus musclées encore – ont été applaudies sans subir de telles campagnes.
Voici une liste d’athlètes féminines célèbres dont le sexe ou le taux de testostérone ont été questionnés, mais sans que cela ne déclenche une campagne de haine, de moqueries ou de lynchage comparable à celle que subit Imane Khelif. Ces cas montrent qu’il existe un poids, deux mesures, souvent empreint de racisme lorsqu’il s'agit de sportives maghrébines ou africaines.
1. Caster Semenya (Afrique du Sud – athlétisme)
• Championne olympique du 800 m.
• A fait l’objet d’un débat médical et juridique sur l’hyper androgénie (taux de testostérone élevé).
• Malgré une très forte médiatisation, pas de harcèlement de masse ou d’attaques vulgaires sur les réseaux sociaux.
• Elle a été soutenue par de nombreuses ONG, médias, et son pays.
• Aucune moquerie ouverte sur son genre dans les médias occidentaux dominants comme c’est le cas pour Imane.
2. Beatrice Masilingi & Christine Mboma (Namibie – athlétisme)
• Deux jeunes prodiges de la course, suspendues des épreuves du 400 m à cause de leur taux de testostérone jugé trop élevé.
• Bien que leur cas ait été controversé, aucune vidéo virale de moquerie, aucun hashtag moqueur, aucune campagne haineuse n’a ciblé leur genre.
• Elles ont bénéficié d’un certain respect médiatique malgré l’exclusion.
3. Laurel Hubbard (Nouvelle-Zélande – haltérophilie)
• Femme transgenre ayant participé aux Jeux Olympiques de Tokyo 2021.
• Il y a eu des débats sportifs sur sa présence, mais pas d’insultes massives, de vidéos haineuses ou de campagnes orchestrées.
• Soutenue par son gouvernement et de nombreuses personnalités.
4. Yaroslava Mahuchikh (Ukraine – saut en hauteur)
• A été la cible de quelques commentaires misogynes et critiques sur son apparence “androgyne”.
• Mais jamais au niveau de ce que subit Imane Khelif. Pas de montage vidéo, de hashtags violents, ou d’insinuations sexuelles dégradantes.
5. Santhi Soundarajan (Inde – athlétisme)
• Gagnante d’une médaille aux Jeux asiatiques, dépossédée de sa médaille après un test de féminité "échoué".
• Même si elle a souffert personnellement et a été exclue, elle n’a pas été la cible d’une campagne globale de haine.
• Aujourd’hui, elle est même défendue comme victime d’un système injuste.
Une réponse scientifique claire : Imane est une femme. Point.
L’équipe médicale de la fédération internationale, les experts de la boxe olympique, et le comité antidopage ont été formels : Imane Khelif est une femme biologiquement et légalement reconnue comme telle. Elle a passé les contrôles médicaux réglementaires imposés à toutes les athlètes de haut niveau. Aucun doute n’existe au sein des instances officielles.
Mais pour ses détracteurs, cela ne suffit pas. Parce qu’ils ne s’attaquent pas à un fait médical. Ils s’attaquent à une icône, à une femme forte, maghrébine, musulmane, algérienne, indépendante. Ce que certains ne peuvent visiblement pas tolérer.
Une campagne de haine ciblée... contre l'Algérie toute entière
Ce harcèlement ne vise pas seulement une sportive. Il vise l’Algérie. Il vise une nation qui dérange par sa fierté, sa dignité, sa force, son histoire. Ces attaques sont les symptômes d’une hostilité plus profonde, d’une peur face à une jeunesse algérienne ambitieuse, qui ne courbe plus l’échine, qui gagne et qui s’impose.
Car que reproche-t-on vraiment à Imane, sinon d’avoir gagné ? D’avoir levé le drapeau algérien sur la plus haute marche ? De ne pas correspondre aux clichés occidentaux sur la “femme musulmane” fragile, soumise, silencieuse ?
Ce que nous devons faire : se lever, ensemble
Ce cyber harcèlement est d’une gravité extrême. Il est
• Sexiste, car il nie la diversité des corps féminins.
• Raciste, car il cible une femme arabe et musulmane.
• Diffamatoire, car il repose sur des mensonges et manipulations.
• Violent, car il met en danger psychologique et social une citoyenne algérienne.
- La justice internationale doit être saisie : pour enquêter sur cette campagne coordonnée et punir les auteurs.
- Une campagne nationale et internationale de soutien doit être lancée : sportifs, institutions, journalistes, influenceurs doivent se mobiliser.
Imane, notre fierté, notre sœur
Imane Khelif, ce n’est pas seulement une championne. C’est une sœur pour des milliers d’Algériennes. C’est un modèle pour les jeunes filles des quartiers, des campagnes, des montagnes, qui rêvent de sport, de liberté, de combat, de victoire. Une femme puissante, sans artifices, sans concessions. Une femme qui n’a pas eu besoin de s’agenouiller devant les standards occidentaux pour exister. Une femme algérienne, tout simplement.